Marcher à son âge : comprendre et prévenir les risques de santé sur le chemin de Compostelle

11 octobre 2025

compostellegradignan.fr

Des corps qui racontent le temps : les fragilités de l’âge en chemin

Lorsque l’on avance en âge, le chemin se fait plus exigeant pour le corps. Selon l’INSEE, en 2020, 38 % des plus de 65 ans déclarent avoir des limitations d’activités physiques. Mais cela ne veut pas dire que l’aventure est hors de portée. Toutefois, il est essentiel de connaître les fragilités les plus courantes :

  • Perte progressive de masse musculaire (la sarcopénie). Après 65 ans, la force musculaire diminue d’environ 1,5 % chaque année (source : INSERM).
  • Diminution de l’endurance cardiorespiratoire, le cœur et les poumons pouvant fournir un effort moins longtemps qu’auparavant.
  • Fragilité osseuse et articulaire : l’ostéoporose touche près d’une femme sur trois après 65 ans (source : Ameli.fr).
  • Equilibre moins sûr, avec léger ralentissement des réflexes et de la perception, ce qui accroît le risque de chutes : une personne sur trois de plus de 65 ans tombe au moins une fois par an (Santé Publique France).

En somme, le corps transmet des signaux plus tôt : fatigue, douleurs articulaires, essoufflement… Savoir les écouter, c’est déjà prévenir.

Les principaux risques physiques : chutes, blessures et surmenage

Chuter sur des sentiers parfois imprévisibles

Les chutes sont le risque numéro un pour les marcheurs âgés, selon la Fédération Française de Randonnée : elles provoquent 87 % des accidents chez les seniors en marche loisirs. Sur Compostelle, les sentiers sont loin d’être toujours plats : racines, pierres glissantes, pentes raides, flaques… Le relâchement de l’attention dû à la fatigue accentue le danger.

  • Prévention : bâtons de marche, chaussures à semelle crantée, étapes courtes, bagage allégé, pauses fréquentes, choix de l’itinéraire (étudier les dénivelés la veille).

Douleurs des pieds et ampoules, l’ennemi silencieux

La fragilité de la peau augmente avec l’âge. Les ampoules infectées ou de simples ongles mal entretenus peuvent dégénérer plus facilement en infections, surtout chez les marcheurs diabétiques.

  • Prévention : vérification quotidienne des pieds (surtout pour les diabétiques), chaussettes à coutures plates, entretien rigoureux de l’hygiène.

Surmenage musculaire et tendinites

Le risque de tendinites du tendon d’Achille ou du genou est accru avec l’âge. Le poids du sac, la répétition des efforts ou un terrain accidenté favorisent les inflammations.

  • Prévention : bâtons, chaussage adapté, charge légère, éviter les étapes trop longues ou trop abruptes.

Risques liés aux maladies chroniques et à la polypathologie

Selon la Haute Autorité de Santé, 44 % des 65-74 ans vivent avec au moins deux maladies chroniques. Hypertension, diabète, troubles cardiaques, arthrose… Sur le chemin, ces pathologies ne disparaissent pas, au contraire, elles peuvent s’accentuer.

Gestion du diabète sur le chemin

  • Hypoglycémies inattendues en cas d’effort prolongé ou de repas décalé. Toujours avoir sur soi une source de sucre, vérifier ses glycémies à chaque pause, informer ses compagnons de route.

Prévenir le déséquilibre de la tension artérielle

  • L’activité physique diminue souvent la tension, mais la fatigue ou l’insolation peuvent, à l’inverse, déclencher des hypertensions. Cela demande d’avoir toujours son traitement, et de consulter avant le départ.

Gestion des traitements (médicaments)

  • Un traitement oublié peut avoir des conséquences sérieuses. Prévoir son ordonnance, une réserve de médicaments et une boîte de rangement compartimentée. Anticiper la difficulté d’accès à certaines pharmacies rurales, notamment sur les étapes du weekend.

Prévenir la décompensation des maladies chroniques

  • Marcher en limitant les efforts violents, éviter la déshydratation et signaler immédiatement à ses proches tout symptôme inhabituel (oppression, vertiges, essoufflement inhabituel, œdèmes…).

Risques cutanés, hydratation et chaleur : le poids de la météo sur la santé

Soleil, chaleur et déshydratation

L’organisme âgé perçoit moins la soif : après 65 ans, nombre de personnes ressentent moins bien le signal même en cas de déshydratation débutante (source : Société Française de Gériatrie). Or, une déshydratation peut très vite survenir par fortes chaleurs, mais aussi par vent sec ou froid – la transpiration, parfois invisible, augmente dans ces cas-là.

  • Boire par petites gorgées toutes les 15-30 minutes, même sans soif
  • Privilégier une gourde accessible (pas au fond du sac)
  • Prendre une casquette à large bord, des lunettes solaires, un tee-shirt couvrant
  • S’arrêter à l’ombre entre 12h et 16h, notamment en été

Coups de soleil et brûlures de la peau

  • Appliquer une crème très haute protection : la peau vieillissante est moins réparatrice, le risque de lésion importante est augmenté.

Risque d’hypothermie en cas de mauvais temps

  • La sensation de froid s’émousse en vieillissant. Prévoir, même au printemps, un coupe-vent chaud et une couverture de survie. S’arrêter dès les premiers frissons.

Isolement, troubles cognitifs : quand la marche peut devenir dangereuse

Un marcheur âgé, parfois fatigué ou peu alerte, peut se perdre plus facilement. Selon France Alzheimer, 8 % des plus de 65 ans éprouvent des difficultés de mémoire suffisant à gêner la vie quotidienne – ce n’est pas rien sur des chemins souvent peu balisés.

  • Privilégier le cheminement en groupe ou à deux, surtout sur les étapes isolées
  • Avoir un téléphone chargé, une fiche contenant ses coordonnées et pathologies dans la poche : utile en cas de malaise ou de perte d’orientation
  • Installer une application de géolocalisation simple ou un GPS de randonnée

Fatigue morale, solitude et découragement

Le chemin de Compostelle n’est pas qu’un effort du corps. La monotonie de certaines étapes, la difficulté à dormir en gîte, la lassitude ou une sensation d’isolement peuvent devenir accablantes. Chez les plus de 70 ans, l’isolement social est un facteur connu de ralentissement de la récupération et d’aggravation de la dépression (source : Fondation de France).

  • Alternance de marche seule à des temps de partage dans les haltes ou les accueils
  • Privilégier le compagnonnage, même de brève durée
  • Garder un contact quotidien par téléphone avec ses proches ou ses amis

Anticiper pour mieux avancer : conseils pour une marche sûre et joyeuse après 65 ans

  • Passer une visite médicale avant le départ, confier son projet à son médecin traitant et mettre à jour ses vaccins
  • Choisir des étapes adaptées, entre 10 et 18 km/jour pour les moins entraînés, avec des pauses et hébergements réservés d’avance si possible
  • Bien préparer son sac, le limiter à 7-8 kg, bien régler les sangles pour ménager le dos
  • Emporter une carte vitale, la liste des traitements, les numéros utiles
  • Accepter l’imprévu : ralentir, s’arrêter, repartir. Ce n’est pas tricher, c’est respecter sa propre marche.

L’essentiel à garder en tête : le chemin se vit à son rythme

Marcher à 65, 75 ou même 85 ans sur Compostelle, c’est possible, mais cela demande d’écouter son corps, de prévoir ses besoins et d’oser demander de l’aide. Chaque étape mérite d’être savourée sans urgence, sans se mesurer aux autres ou à son passé. Sur le chemin, le plus beau des compagnonnages, c’est peut-être celui que l’on accorde à son propre corps, en acceptant ses limites et ses forces nouvelles.

N’hésitez pas à venir discuter de vos appréhensions, à partager vos doutes ou vos questions à Gradignan ou sur ce blog. Le chemin commence toujours par une écoute – celle du cœur, du corps, et parfois, des conseils d’un autre marcheur passé juste avant vous.

Sources : INSERM, INSEE, Santé Publique France, Fédération Française de Randonnée, Ameli.fr, France Alzheimer, Société Française de Gériatrie, Fondation de France.

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