Se préparer pour le chemin : la santé avant le sac à dos

24 septembre 2025

compostellegradignan.fr

L’utilité d’un bilan médical avant de partir

Faire le point sur sa santé avant un pèlerinage à pied est loin d’être un luxe, même si l’on marche « à son rythme ». Quelle que soit la durée ou l’intensité prévue, il s’agit d’un effort d’endurance, parfois sur plusieurs semaines, avec des contextes parfois isolés. Selon l’Association Française des Diabétiques (AFD), près d’1 randonneur sur 4 souffre d’une pathologie chronique, parfois ignorée. Un tiers des pèlerins Compostelle auraient au moins 60 ans (source : Chemins de Compostelle).

Le bilan de santé permet :

  • De détecter des contre-indications temporaires ou définitives (pathologies cardiaques, respiratoires non stabilisées, etc.),
  • D’adapter son parcours et son équipement,
  • De préparer un plan de prévention des risques (pharmacie de marche, adaptation des traitements),
  • De rassurer ses proches, et parfois soi-même.

Quels professionnels consulter ?

En France, le point de départ reste votre médecin traitant. Il connaît votre dossier, vos antécédents et saura réorienter vers des examens complémentaires si besoin. Il peut vous donner un certificat d’aptitude à la marche longue distance (parfois demandé dans certains hébergements espagnols, notamment sur des chemins organisés). Les seniors, les personnes avec maladie chronique ou traitement au long cours doivent envisager une consultation spécifique chez le spécialiste de leur pathologie (cardiologue, diabétologue, orthopédiste…).

Médecins de médecine du sport

Considérés comme les plus à même de conseiller sur le plan « effort d’endurance », ils sont à privilégier si vous pratiquez déjà une activité sportive ou si vous préparez un chemin exigeant. Certains centres hospitaliers et maisons de santé proposent des consultations "préparation à la randonnée", souvent dès le printemps.

Examens recommandés avant le pèlerinage : revue de détail

1. Bilan cardiovasculaire

  • Mesure de la tension artérielle : indispensable, car près de 50% des plus de 60 ans sont hypertendus sans le savoir (source : Assurance Maladie).
  • Électrocardiogramme (ECG) au repos : recommandé si antécédent personnel ou familial, pour les plus de 60 ans même asymptomatique, ou en cas de facteurs de risque (diabète, cholestérol, tabac, surpoids).
  • Épreuve d’effort (test d’effort sur vélo ou tapis) : utile si vous n’avez pas d’activité physique régulière ou si le chemin prévu comprend des étapes de montagne. La Haute Autorité de Santé conseille un test chez les hommes de plus de 45 ans et les femmes de plus de 55 ans avant la reprise d’une activité d’endurance soutenue.

Signe d’alerte à ne jamais négliger : douleurs thoraciques à l’effort, essoufflement inhabituel, palpitations, malaise.

2. Contrôle articulaire et musculaire

Les chemins sont amis du genou, mais mettent à rude épreuve chevilles, hanches, dos et pieds. Le médecin peut évaluer :

  • Mobilité et stabilité des articulations : examen des genoux et des pieds, recherche de hallux valgus, d’arthrose, ou d’instabilité chronique.
  • Examen du dos : pour dépister une sciatique, une hernie ou un problème lombaire.
  • Force musculaire : test simple (se lever d’une chaise cinq fois sans aide par exemple), utile pour anticiper la fatigue.

Selon les résultats, une consultation chez le kinésithérapeute ou un podologue peut être proposée. 70 % des blessures sur le chemin sont d’origine mécanique (source : Fédération Française de la Randonnée Pédestre – FFRandonnée).

3. Équilibre, vue et audition

  • Test d’équilibre statique et dynamique surtout pour les plus de 65 ans. Chutes et trébuchements sont fréquents sur les tronçons pierreux ou glissants.
  • Contrôle de la vue (myopie, presbytie, sensibilisation à la lumière et capacité à repérer les obstacles/signes au loin).
  • Contrôle de l’audition pour rester alerte aux bruits de l’environnement (rivière, circulation) ou à ses compagnons de marche.

L’OMS rappelle que 1 chute sur 6 chez le senior a lieu lors d'une activité de plein air, souvent lors de sorties prolongées.

4. Glycémie, bilan métabolique et contrôle des pathologies chroniques

  • Bilan sanguin standard : hémogramme, ionogramme, créatinine, bilan hépatique si prise de médicaments régulière.
  • Glycémie (à jeun) : surtout chez les marcheurs diabétiques ou suspects de l’être. Marcher plusieurs heures influe sur l’équilibre du sucre. L’avis du diabétologue est alors capital pour ajuster traitements et collations.
  • Bilan lipidique (cholestérol total, LDL, HDL) chez les sujets à risque cardiovasculaire.
  • Doser la vitamine D si antécédents de fractures ou en cas d’ostéoporose avérée.

Un bilan urinaire peut compléter si antécédent de calculs rénaux ou infections urinaires à répétition.

5. État vaccinal et prévention infectieuse

  • Vaccins à jour (DT-Polio, Coqueluche, Hépatite B parfois recommandé).
  • Vaccin antigrippal pour les plus de 65 ans (la grippe frappe parfois même sur les chemins printaniers).
  • Vérifier la nécessité d’un vaccin contre la tique ou l’encéphalite à tiques (rando dans certaines régions boisées).

Source : Santé Publique France, https://www.santepubliquefrance.fr

Focus : le cas particulier du senior ou du marcheur avec pathologie chronique

Le chemin accueille chaque année des seniors motivés, petits pas compris. Ceux qui vivent avec une maladie chronique (diabète, hypertension, maladie pulmonaire, troubles du rythme cardiaque, troubles neurologiques, etc.) doivent dialoguer avec leur médecin sur deux points majeurs :

  • Rôle et gestion des traitements : besoin d’adapter les horaires ou les doses, nécessité d’ordonnances doubles (une pour soi, une à laisser en cas d’urgence médicale sur le chemin), prévoir les situations de rupture ou d’oubli (le port d’un pilulier solide, une liste des médicaments à jour sur soi).
  • Document médical personnalisé : certains assurent leur sécurité avec une fiche cartonnée plastifiée indiquant nom, pathologies, traitements, allergies et numéro d’urgence, glissée au fond du sac ou sur leur poitrine.

Conseil utile : pour les porteurs de pacemaker ou DAI, le carnet du dispositif doit accompagner chaque étape du parcours.

Avant de partir : dernières recommandations pratiques

  • Faire réviser ses chaussures et boiter au besoin chez le podologue : mauvaise semelle, ongle incarné, cor au pied… mieux vaut prévenir avant de parcourir 20 km sous le soleil.
  • Planifier des étapes progressives : ne jamais commencer par une « longue » randonnée. Deux ou trois marches préparatoires de 2 à 3 heures avant le départ affinent la préparation physique.
  • Prendre une assurance adaptée (responsabilité civile, accident, rapatriement depuis l’étranger) : certains contrats mutuelles couvrent automatiquement les randonnées, d’autres non.
  • Anticiper la gestion de l’eau, du soleil et des coups de chaleur : faire le point lors de la visite médicale sur les signes précoces de déshydratation (crampes, vertiges), toujours emporter une gourde adaptée, ajuster la prise des médicaments photosensibilisants (certains antibiotiques, anti-inflammatoires, etc.).

L’étape de Gradignan : ressources et accompagnement sur place

A Gradignan, de nombreux praticiens de santé connaissent la spécificité du départ vers Compostelle. Quelques astuces locales :

  • Le centre médical de l’avenue Favard propose un créneau spécial pour les bilans sportifs tous les mardis matins, particulièrement en mars-juin.
  • Les pharmaciens du centre acceptent de relayer vos ordonnances pour des réassorts de médicaments dans la plupart des grandes villes traversées sur le GR.
  • Une permanence d’aide à la préparation (informations, contacts podologues, kinésithérapeutes) existe à la Maison des Pèlerins, près du parc de Laurenzane.

Cheminer serein : pourquoi ces précautions font partie du voyage

Emprunter le chemin de Compostelle, c’est accueillir la marche comme une rencontre avec soi, la nature, l’effort et parfois la difficulté. Les examens médicaux ne sont pas là pour décourager mais pour donner confiance – pour éviter la surprise d’une douleur qui gâcherait un paysage, d’un malaise qui ferait taire le chant d’un oiseau, d’un pépin de santé qui transformerait la belle aventure en galère.

Prendre soin de vous avant de partir, c’est prolonger la joie d’être sur le chemin à chaque pas, sans remords ni inquiétude. Car sur Compostelle, comme ailleurs, l’essentiel n’est pas la vitesse ni la distance, mais la qualité de la marche et la sérénité qui l’accompagne, sachant que l’on a fait, avant, tout ce qu’il fallait pour partir du bon pied.

Sources principales :

  • Haute Autorité de Santé – Préparation à la randonnée (2023)
  • Fédération Française de la Randonnée Pédestre – Statistiques blessures et accidents (2022)
  • Santé Publique France : Vaccination des adultes (2023)
  • Mémento France Assos Santé : Préparer un voyage à pied après 60 ans
  • OMS : Chutes du sujet âgé (2021)
  • Assurance Maladie – Hypertension chez les plus de 60 ans (2024)

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